Le sentiment d'insécurité par Virginie Megglé

Article écrit par Virginie Megglé.

" L’évocation et l’invocation répétitives de la «sécurité» comme enjeu politique à travers les médias m’ont amenée à me demander comment, aujourd’hui, le but de sécurité, à la source de la confiance en soi et de ses capacités d’ouverture sur le monde, en venait à servir de pré-texte au tout-sécuritaire, qui parfois déclenche l’inquiétude plus qu’il ne l’apaise.
Face à des parents dominés par leur sentiment d’insécurité, il arrive que l’enfant affiche (simule) des attitudes de grande assurance: tout-savoir, témérité, omnipotence. Dissimulant l’inquiétude de ne pouvoir entrer en contact avec le monde tout en feignant d’y parvenir sans problème. Comme si l’inquiétude parentale anesthésiait le propre sentiment d’insécurité de l’enfant, au point que celui-ci donne l’impression de ne pas en être l’objet. Tant celui de l’adulte le trouble, l’encombre, le paralyse.
On peut se demander si celui ou celle qui remplit la fonction parentale - dans le réel ou par substitution symbolique – n’alimente pas, comme malgré lui, l’inquiétude plus qu’il n’invite à la surmonter et à l’apaiser, quand il ne peut plus concevoir ni émettre à l’égard de l’enfant de fiction directrice tangible, réconfortante, dans le sens de la vie. Comme si, au-delà de l’apparence rassurante du tout-sécurité, ne parvenant à autoriser l’apaisement de l’enfant, il le maintenait sans cesse en devoir de vigilance extrême. Comme si l’adulte - ou l’état qui le représente - ne pouvait projeter l’enfant dans un avenir correct qui entrât en écho et en correspondance avec la réalité de cet enfant-là.
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Aussi, quand l’actualité met en valeur l’évidence et le bien-fondé de sa philosophie, je crois qu’il est bon de rappeler que si Freud a élaboré le complexe d'Œdipe, la conception de ceux d'infériorité et de supériorité, à la source desquels se trouve cette insécurité constitutive de l’homme qu’il a mise en lumière, revient à Adler.

• Développement

Pour commencer, je soulignerai, une fois de plus, cette pensée: «Être humain signifie souffrir d’un sentiment d’infériorité qui incite constamment l’être à le surmonter».
Partant de là, j’ai tenté d’approcher certains processus de structuration de la personnalité d’un enfant, au sein d’une relation maternelle inquiétante. Et la structuration de cette relation, lorsque le sentiment d’insécurité inhérent au petit de l’homme, est exacerbé tant chez la mère que chez l’enfant. Comment, à partir de ce sentiment premier, s’élabore et s’installe, même déguisée en son contraire, une insécurité profonde qui marque de son empreinte le style de vie….
« Toute la psyché de l’enfant étant imprégnée » comme le soulignent Mormin et Viguier, « du rapport avec l’autre », je me suis demandée comment, dans les premiers temps, les premières années de la vie, la présence de cette autre pas tout à fait autre qu’est la mère pouvait interférer de façon déterminante dans le développement ultérieur de l’enfant, par le biais des transmissions. D’indicible à indicible. De corps à corps. D’inconscient à inconscient. D’incompris à incompris. Et quel était le sens, à travers le non-dit des émotions, des réactions de l’enfant ? Quand ces réactions sont induites par exemple, par des phénomènes de mimétisme plus ou moins conscients, qui le conduisent à s’identifier à sa mère ou à la protéger. Ou encore à se contre-identifier à son père…
Ces réactions, bien sûr, trouvant des expressions différentes selon le milieu, l’histoire, la culture familiale, la position dans la fratrie, selon que l’on soit fille ou garçon.
Autrement dit, quels peuvent être les effets de transmission du sentiment d’insécurité dans la relation maman enfant ?
Comment celui-ci, quand il n’est plus moteur de progrès, se traduit-il dans le comportement de qui en souffre au fur et à mesure qu’il grandit ? Est-ce qu’il n’est pas à la source de certains réflexes ou comportements sécuritaires qui tout en prétendant rassurer exprimeraient en fait une inquiétude inhibante et fondamentale (bien que parfois figée ou neutralisée) chez celui ou celle qui les exprime.
Comment, l’inquiétude, une fois installée, aggrave le sentiment premier d’infériorité tant chez l’enfant que chez la mère, lorsque cette dernière par exemple se sent coupable de cette infériorité car elle se vit incapable de rassurer au cœur de ce cocon où se nourrit -ou se désagrège- le sentiment communautaire inné ?

Suite de l'article de Virginie Megglé